L'affaire Matisse

La mère de Matisse est gardienne de la sécurité dans un musée, d’où les prénoms de ses enfants, Frida, Matisse et Man Ray le petit dernier. Tous ont un certain sens créatif et Matisse s’amuse par exemple à copier les tableaux du musée les uns après les autres. En ce moment, il s’intéresse à une exposition consacrée à… Henri Matisse. Le garçon reproduit le fameux Portrait de Pierre Matisse. Jugeant son œuvre parfaite, et pris d’une mauvaise impulsion facilitée par une défaillance du système de sécurité, il met son tableau à la place de l’original. Mais quand il veut rattraper sa bêtise, les caméras et les lasers fonctionnent à nouveau. Matisse va provisoirement devoir emmener le vrai tableau chez lui, et guetter l’occasion de procéder à un échange.
Ce petit roman est finement hilarant. Centré autour de la Bêtise avec un grand B du héros, il le laisse, en tant que narrateur, nous décrire par le menu les affres qu’ils subit pendant, disons, une petite semaine. Nous suivons Matisse dans son quotidien pas banal : la sœur fait une fixette sur le violet, le père traiteur cuisine son plat du jour pour le petit déjeuner, la mère a reproduit un petit musée des créations de sa progéniture à la maison, etc. C’est drôle, très humain. Nous voyons aussi ses bourdes s’accumuler, le plus bel exemple étant Man Ray essayant de mettre sa tétine dans la bouche du Pierre de peinture… Le meilleur ami Toby sert de commentateur sage : il réhausse encore le niveau d’empêtrement dans lequel s’est mis Matisse. Heureusement, après moult péripéties et essais ratés, la fin arrive, douce et sincère, riche en émotions fortes liées autant à la filiation qu’à l’art. Matisse comprend qu’il n’a pas de raison d’avoir honte de son excentrique famille (y compris le barbecue à roulettes de son père). Mais surtout, un artiste est né. Un roman qui parle culture en faisant rire, ce n’est pas si courant, et L’Affaire Matisse se lit d’une seule traite.