Waterlo & Trafalgar

D’un côté de la tranchée, le soldat bleu. De l’autre côté, le soldat rouge. Chacun organise sa petite vie, avec des habitudes étrangement similaires : sport, musique, cuisine (là, ils ne sont pas d’accord, et l’escargot n’a pas la même valeur pour chacun), etc. De temps en temps se déroule une petite escarmouche, comme pour justifier la présence de l’armée ici. Et puis, d’un battement d’ailes, un oiseau se pose. Il pond, l’œuf se fendille vite, et un oisillon apparaît. Il est… rouge et bleu. Les deux soldats se réconcilient autour de ce beau symbole.

Waterloo et Trafalgar, deux défaites ou deux victoires : dès le titre, l’égalité entre les belligérants est affirmée. Entièrement sans paroles, l’album en bichromie compte sur la force de son dessin épuré, l’expressivité de ses petits personnages pris en flagrant quotidien. Quelques découpes complètent le dispositif, donnant à observer en silence un tableau complet de l’absurdité de la guerre. On fonctionne ici à l’instinctif, tout à tour ému, effrayé avant de sourire à la dernière page, summum de l’inanité. Waterloo & Trafalgar n’est pas sans rappeler L'ennemi de Davide Cali et Serge Bloch : tout se passe comme si, pour dénoncer le chaos, rien ne valait la simplicité, un retour à la nature essentielle d’une terre que nous ne faisons qu’occuper… Joliment nécessaire.